- Photographies personnelles des régions de la Margeride à l'Aubrac et surtout les grands plateaux calcaires qui font suite ( et fin ) aux grands Causses -
dimanche 2 mars 2025
mercredi 30 octobre 2024
les pierres et leur visage -
Toutes les pierres et leur visage,
le secret enfermé dans la matière
statues figées de calcaire,
plateaux basculés de vent
abîmes et pas de géants…
la montagne encore m’attend
….sa façade altière
où ne s’ouvrent les portes
qu’avec la force tellurique
moi qui ne connais pas encore
la formule magique.
Le dédale des grottes
ne se résume pas à un « Sésame ».
Il s’agrandit sous nous pieds
La lumière s’y enterre
dans les galeries de l’âme.
Quelques animaux hantent
les parois verticales
traces humaines, mains négatives,
ocres et charbonneuses
on y entre comme par effraction.
Les pas portés avec précaution
comme dans un sanctuaire
entre colonnes et draperies:
tout un univers caché
profondément sous terre
où les dieux sont pétrifiés…
cf Ada Mondès — https://www.terreaciel.net/Ada-Mondes
Là où les Hommes oublient d’aller
les montagnes sont criblées de fleurs et de trous de serrures
orbites creuses des géants
bouche de la fée pétrifiée dans le sel
des enfants d’argile
des galeries pour l’âme
Si je marche là-bas
ma clé imaginaire ouvre toutes les portes
les sanctuaires dans la roche
La poésie toujours a sa demeure dans le ventre des montagnes
là où toutes les pierres ont un visage
vendredi 4 octobre 2024
Modeste contribution à l'architecture - ( RC )
photo perso - Pailhers de Bramonas... le puits ( commune de Balsièges Lozère )
Un défi
en pierres sèches,
après l'assise, les fondations
le sable le ciment
les brouettes oscillant,
tu penses ... mur
et il s'élève
lentement
obtus de pierres
lourd puzzle
où on aligne
même les informes
calant les interstices
question d'équilibre
future forteresse
peut-être
jusqu'à occulter le jour
sauf à prévoir
l'accueil de la lumière
linteaux ouvertures
archère, meurtrière
insérer les gonds
fenêtre future
finition, joints
modillon, écoinçon
modeste contribution
à l'architecture
mardi 26 mars 2024
Le don fauve d'un jour - ( RC )
photo perso juillet 2023 environs de Nissoulogres, au dessus des gorges du Tarn
-
Vers Nissoulogres
le don fauve d'un jour
était, comme nous,
en équilibre sur la crête.
Le sentier de pierre,
bordé de buis,
accueillait le vent,
suspendu à l'extrème bord du causse,
prêt à basculer dans l'ombre bleue.
Il ne voulait pas abdiquer
devant l'avancée de la nuit
qui déjà, rampe
au fond de la rivière.
Nos pas nous emportaient
vers des chemins étroits
bordés de murets centenaires
dessinant leurs lignes dorées
dans le lointain d'un lent crépuscule.
Il se déposait, comme tous les soirs
avec la poussière des ans
sur le berceau de calcaire:
( songe renouvelé
où se sommeil des pierres
connaît son moment ultime ),
figé, juste avant la nuit,
dans notre rétine...
RC
ce texte est un écho à celui de Susanne Derève, que l'on peut lire ici
vendredi 1 mars 2024
Sur le fil d'une rencontre invisible - ( RC )
photo perso - site de Montbrun, vallée du Tarn–
Je suis sur le fil, d’un tracé invisible.
Il est sous mes pieds, mais abrité d’ombre
Et de terres, croisées sous la coupe de l’hiver.
La mer y a habité, pesé de son poids de vagues
Contourné des falaises et des îles
Déposé son lit de calcaire, sous des ciels de plomb,
Avant que le sol ne penche, et que l’eau ne reflue,
Comme ont reflué les siècles, perdus dans la mémoire du monde…
Je suis sur le fil, d’une rencontre invisible,
Où les pierres se confrontent, les torrents se ruent,
Et les chemins s’enroulent, sur les crêtes de vertiges,
Si nous allons de ce pas, sur la croupe ouverte,
Où la droite, n’a jamais de prise, aux chutes des pentes,
De l’Aubrac aux Cévennes, que parcourent, attentifs,
Beaucoup plus souvent, vautours que goélands,
Au dessus des lèvres ouvertes, des méandres du Tarn…
Ce ne sont pas les amours splendides
Des légendes bretonnes, marquées de la rage des pluies,
– Et des voiles qui claquent,
Au plancher liquide, d’une mer grise,aux promesses de pêche
Mais le territoire, tourmenté de vallées profondes,
> Disputant ses ombres à la rudesse du causse,
Où de fermes de pierre, en vaisseaux désertés
Sont gardés de ruines rocheuses, les lèvres hautaines.
–
en « réponse », à un texte de Xavier Grall
–
ESCALE EN LEON
vendredi 14 juillet 2017
Jacques Borel - Lozère
LOZÈRE - extrait du recueil " les murs du temps"
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Mon passé est mon avenir, mon avenir est mon passé,
Je n’ai jamais su où finir mais avais-je rien commencé
Et ce fleuve qui me sépare de cet autre horizon du temps
Où une rose de drapeaux halète dans la main du vent
Je suis en moi son origine jusqu’à cette pierreuse source
Dans la combe d’une poitrine où se confondent d’autres sources
Et dans ces rivages touffus engloutis dans la profondeur
Où mon père parle à ma mère une langue que je retrouve
Si la nuit j’expire à mon tour ce souffle d’herbe au fond des douves
Ou cette plainte murmurée à des lèvres immémoriales.
Quelle foule escorte toujours dès qu’elle a refermé la porte
Ou que décroît un pas perdu sur une route de baisers
La visiteuse chaque soir qui se penchait sur mes paupières
Et les mêmes témoins nocturnes jadis dans l’ombre du rideau
Ont-ils cessé de chuchoter leurs longs secrets cousus de larmes
A cet enfant abandonné dans les décombres du sommeil ?
Je reconnais sous les arceaux d’un même feuillage immobile,
A la table sous la tonnelle ou près du mur entre les roses,
Leur visage toujours cerné du même cerne de velours,
Ce soldat qui n’en finit plus de regarder loin devant lui,
La même aïeule sous sa guimpe et, dans le cloître de ses mains,
Cette religieuse peut-être qui sut un jour mon nom d’enfant
Et qui le cherche dans sa bouche où tremble encore un autre nom.
D’autres sont là, cachés, trahis par la nuit blanche de l’épine,
Près du portail dont j’ai perdu depuis longtemps la clé rouillée,
Je n’ai jamais rien connu d’eux que leurs robes dans le grenier
Ou ces habits tissus de vent dans des armoires entrouvertes,
Mais il suffit que je m’approche de cette combe sous les feuilles,
Là où commence la forêt et ses dédales interdits,
Pour que leurs mains touchent mes mains, pour qu’ils effleurent mon visage
Ou que j’entende dans ma gorge sourdre leur plainte ensevelie.
Reproche, sourire, murmure, patrie émiettée dans le cœur,
A chaque geste que je fais, au battement d’un cil soudain
Ou si mes doigts cherchent dans l’ombre un autre corps qu’ils croient vivant,
Cette caresse éveille au fond de son lit d’algue et de soupirs
Un autre couple bouche à bouche, un autre fleuve de baisers;
Elles se renouent dans mon sang les lentes noces solennelles,
Les fiançailles chuchotées, leurs tendres gestes de jacinthes,
Et ce tremblement d’une main jadis dans la houle nocturne
Affleure encore au ras des eaux et me supplie de l’achever.
J’ai déjà dit ce même nom, j’ai déjà bu ce même souffle,
Tout ressurgit, le temps intact, les longues strates dans le songe,
Et toi, mémoire aux deux visages, mémoire plus vieille que moi,
Tu m’entraînes toujours plus loin sous cet humus d’images en moi
Où les mêmes gestes sans âge retrouvent le secret des jours
Et les gisantes dans leur lit qui se referment doucement
Regardent la lune grandir sur l’aire pleine de bouquets
— Je vois comme elles au bord du ciel une charrue abandonnée,
Ce bras levé et dans ce poing une poignée de grains brûlants,
Cette Lozère sous les pierres et son murmure de forêts,
Ces loups même l’un contre l’autre serrés sur le seuil un matin
Et jusqu’à ce village vide où une femme en robe noire
Fait encor signe sur la route à un enfant qui n’est plus là.
mardi 20 juin 2017
Blés des causses - ( RC )

photos perso :causses Méjean & Sauveterre
Les petites sorcières de la nuit,
se cachent entre les pierres,
présentes et toujours immobiles ,
même dans la brume du jour.
En silhouettes inanimées ,
elles activent leurs ombres ,
endossant leur poids de silence.
Leur échappant , des vagues vert-jaune
ondulent au sol , caressées par le vent.
Les blés contredisent les gris austères .
Le causse a son discours
empreint de mystère
qu'on ne peut traduire,
avec des mots .
Mêmes les images
ne parlent que d'instants .
son étendue ne se cerne pas .
Comme l'ancienne mer qu'elle recouvre ,
il a quelque chose d'une houle
qui se prolonge aux horizons ,
avant de chuter brutalement
au plus profond des gorges.
-
RC - juin 2017

mardi 13 juin 2017
Pierres du Mont Lozère

quantité de pierres,
de gros calibre,
parfois en équilibre .
la face contre le ciel,
portent le monde à l’envers,
le nez en l’air…
avec l’âpre vent,
la tempête et le froid
où les arbres peinent à tenir droit.
qui accompagne les saisons ?
Sur leur peau douce
ne s’aggrippent pas les mousses
ce sont des masses de granite,
lentement accumulées
qui ne risquent pas de s’envoler.
dépourvues d’ailes ,
qui veillent sur la plaine,
et le décor de la scène ,
leur muette consistance
parle de leur patience :
ce n’est pas demain qu’elles vont s’écrouler…