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mardi 24 septembre 2024

dans un temps suspendu, indéfini - ( RC )

 



photo Michel Séguret - Causse Méjean l'hiver



Les plaies du sol saignent de leurs veines:

des précipices, des abîmes
des roches qui les surplombent
de gardiens du temps,
inamovibles.

Les vautours s’en font refuge
surveillent les vallées profondes,
les minces filets d’eau
brillant comme argent.

Tout cela se passe de paroles,
qui de toute façon,
ne trouveraient pas d’écho
aux extrémités opposées des causses,
désaccords de nue solitude.

Il n’y a que la neige
pour lui donner une unité:
l’un après l’autre, les reliefs en sont recouverts:
elle panse les blessures
même de façon provisoire:

chaque petit grain minuscule s’accrochant
à l’immobile, rejoint son semblable
pour étendre sa lingerie immaculée.

Cela sans le moindre bruit.
A l’orée du bleu, le ciel disparaît
derrière un rideau gris,
d’autant plus gris que le blanc
répercute dans son velours
la moindre lueur.

Il semble à portée de main
et la lumière est en sa demeure
celle des choses occupant tout l’espace,
trop grand sans doute pour nous,

car tout s’efface,
comme si plus rien ne subsistait
sous la surface unie,
vierge de toute présence,

dans un temps suspendu, indéfini.

samedi 10 août 2024

dans un temps suspendu, indéfini - ( RC )

 

photo Michel Séguret - " au bout du champ"  ( causse Méjean )




Les plaies du sol saignent de leurs veines:

il y a des précipices, des abîmes 

où les roches qui les surplombent

ont l'air de gardiens du temps,

inamovibles.


Les vautours s'en font refuge

et surveillent les vallées profondes,

les minces filets d'eau

brillant comme argent.


Tout cela se passe de paroles,

qui de toute façon,

ne trouveraient pas d'écho

aux extrémités opposées des causses,

désaccords de nue solitude.


Il n'y a que la neige

pour lui donner une unité:

l'un après l'autre, les reliefs en sont recouverts:

elle panse les blessures

même de façon provisoire:


chaque petit grain minuscule  s'accrochant

à l'immobile, rejoint son semblable

pour étendre sa lingerie immaculée.


Cela sans le moindre bruit.

A l'orée du bleu, le ciel disparaît

derrière un rideau gris,

d'autant plus gris que le blanc

répercute dans son velours

la moindre lueur.


Il semble à portée de main

et la lumière est en sa demeure

celle des choses occupant tout l'espace,

trop grand sans doute pour nous,


car tout s'efface,

comme si plus rien ne subsistait

sous la surface unie,

vierge de toute présence,


dans un temps suspendu, indéfini.


samedi 20 janvier 2018

Le corps d'un gisant - ( RC )




Mejean  Causse   -  10.JPG

photo perso – causse Méjean  Lozère  2016






Les collines s’offrent,
couchées en travers de l’horizon   .
Leur attitude a celle du corps
d’un gisant,                     endormi
sous le soleil comme sous la pluie ,
avec une robe d’herbes et de pins.

          – Il attend de se réveiller –
après avoir dialogué des millénaires,
       avec les aubes, 
       et ombres furtives .
Celles qui survolent,       sans s’arrêter,
causses          et falaises de pierre .

        Le parcours des nuages,
ne laisse de leur passage
qu’une trace effilochée ,
une sorte d’image du vent ,
-   de celle qu’on ne peut saisir,
ni déchiffrer le message.

On pense les pentes        immobiles : 
elles le sont en quelque sorte,
à notre échelle de temps ,
      mais ce sont des vagues,
et elles déferlent,     rebelles,
sous le ciel oublieux.

Contrairement aux gisants
soulevant les plaines,
        le ciel n’a pas de mémoire ,
et varie               au jour le jour .
Il ne fait pas mystère
de son indifférence.

Que ce soient des périodes gaies
ou attristées par des guerres ,
         des catastrophes,
il ne se souvient de rien.
Il n’est la proie ni du malheur,
ni de la joie .

Alors que la roche
se referme sur ses blessures :
le sol conservant en profondeur,
intact        – le livre de la terre    ,
peuplé de grottes souterraines,
et d’espèces fossilisées.

Souffre-t-elle
du passage du temps ?
En est-elle prisonnière,
ou conserve t-elle
       des êtres de pierre 
dont la légende s’éternise ?

Il suffit de vouloir la lire,
d’aimer les vallées verticales,
de capter le pinceau de lumière
qui les sculpte, et les fait basculer
dans d’autres saisons,
           comme dans d’autres mondes .


RC – juin 2017